France : les projets qataris d’investir dans les banlieues peuvent séduire, mais les intentions derrières ne sont sûrement pas innocentes

Par Sami SHERIF

Décidément le Qatar ne cesse de susciter des réaction hostiles à son endroit. D’habitude, il est montré du doigt à cause soit de la ligne éditoriale de sa grande chaîne d’information et des rapports qu’elle confectionne à propos de nombre de pays, soit alors pour ses interventions et ses activités subversives dans les pays arabes. Cette fois-ci, ça se passe en France et c’est plutôt pour ses investissements dans les banlieues des grandes villes françaises qu’il est contesté. 

Au départ, ses investissements  dans le secteur sportif, au Paris-Saint-Germain (football et handball) et dans l’achat de droits de diffusion TV, puis sur le marché de l’art, étaient les bienvenus, car ils aidaient à maintenir des postes de travail et en créer d’autres et libéraient du capital qui servait à des emplois plus rentables. Mais dès que la presse avait annoncé  que le Qatar s’intéressait depuis fin 2011 aux banlieues françaises, auxquelles il voulait dédier à l’origine un fonds de 50 millions d’euros, une véritable controverse s’est déchaînée.

A présent,  les projets d’investissements du Qatar en France  suscitent des interrogations dans la classe politique, où l’idée d’une commission d’enquête parlementaire commence à faire son chemin. Mais la nouvelle majorité cherche désormais à modifier les contours de cette initiative, en la transformant en projet d’«un fonds franco-qatari», abondé par l’Etat et le privé, destiné à l’ensemble des territoires déshérités pour aider à y créer de l’emploi.

Le Ministre Délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, qui n’a pas voulu s’étendre sur le sujet, a tout de-même a confirmé dimanche que « ce partenariat stratégique n’a pas été initié par nous, peut-être est-il poursuivi sous notre autorité», précisant que «la gauche, au moins autant que la droite, a le sens de l’Etat et de l’intérêt du pays».

De fait, c’est durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy que les liens entre la France et le Qatar se sont resserrés et qu’un tel projet est apparu, mais l’initiative fut reportée après les élections en France, afin d’éviter son instrumentalisation politique. Pourtant à droite, plusieurs figures ont exprimé dimanche leurs interrogations. L’ex-ministre Bruno Le Maire s’est ainsi dit «favorable» sur Radio J, à l’idée d’une commission d’enquête parlementaire sur les investissements du Qatar en France, proposée par son collègue député UMP Lionnel Luca. Mr. Le Maire a jugé les investissements étrangers en France, «ça pose question, cela ne va pas de soi que le Qatar puisse investir à coups de dizaines de millions d’euros dans le sport, les quartiers, sans qu’on comprenne très bien la stratégie de long terme». De sa part, le député souverainiste Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République), élu du même département de banlieue, est vivement opposé à l’entrée de capitaux qataris dans les cités.

Ces précautions ne suffisent pas au député souverainiste Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République), élu du même département de banlieue, vivement opposé à l’entrée de capitaux qataris dans les cités. Il s’est exclamé devant ses paires : «Pauvre pays où une puissance étrangère, je dirais la même chose si c’était les Etats-Unis ou le Japon, vient intervenir dans nos affaires intérieures. Mais où est tombée la France pour accepter ça? C’est fou!».

Le Qatar est petit, mais le rôle qu’on lui a assigné est grand! C’est son ralliement total à la stratégie anglo-américaine qui explique cette hypertrophie de ce minuscule pays! L’Émirat s’est fixé un projet grandiose, celui d’étendre sa présence au-delà des frontières du monde arabes pour amplifier son audience également auprès des communautés vivant en Europe et surtout en France. Après son succès en Tunisie où il a pris pieds à la faveur de la montée des islamistes et leur accession au pouvoir, ses difficultés à déstabiliser l’Algérie et le Maroc, lui ont dicté l’initiative d’aller noyauter ces communautés à partir de ce pays. Il va falloir que les autorités françaises fassent le nécessaire pour que cette audience que cherche le Qatar parmi les maghrébins vivant en France, ne soit pas exploitée pour permettre une extension du wahabisme  qui nourrira un jour les groupes de terroristes orientés vers ces deux pays. Le projet d’investir dans les banlieues peut séduire, mais les intentions derrières ne sont sûrement pas innocentes.

Sami Shérif (Source  AFP)

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