USA : une étude américaine consacre l’idée que le soutien inconditionnel à Israël n’est plus adéquat pour une politique de rapprochement avec les pays musulmans

Ne serait-on pas en train de remettre en question ces rapports privilégiés avec l’Etat hébreux ?

L’annonce d’une réduction de plus de deux tiers des soldats américains qui devaient se rendre en Israël en octobre prochain pour participer à des manoeuvres militaires, coïncide avec la sortie d’une étude réalisée par les agences américaines de renseignement, et mettant en garde les dirigeants américains contre les dangers que représente pour les USA la politique israélienne.

Le Time magazine vendredi 31 août, citant « des sources bien placées dans les deux pays », annonce que Washington diminue de plus de deux tiers le nombre de militaires américains allant en Israël et réduit le nombre et la puissance des systèmes d’interception de missiles qui seront utilisés lors des manœuvres communes baptisées Austere Challenge 12 et prévues en octobre.

Au lieu des quelque 5 000 militaires américains, le Pentagone enverra seulement 1 200 à 1 500 hommes. Les missiles antimissile Patriot seront par ailleurs expédiés en Israël comme prévu, mais les servants américains des batteries ne seront pas envoyés en Israël, selon la même source. Au lieu de deux bâtiments Aegis munis de défense antimissile, les Américains n’en enverront qu’un. Et l’envoi de l’unique navire n’est même pas certain, ajoute Time.

En résumé, le message que les Américains veulent délivrer est le suivant : « Nous n’avons pas confiance en vous », a déclaré à Time un haut responsable militaire israélien. Officiellement, des restrictions budgétaires expliquent ces changements.

Mais les réductions annoncées coïncident avec la tension croissante entre les gouvernements de Barack Obama et de Benyamin Nétanyahou à propos des menaces israéliennes de raid aérien contre l’Iran en raison de son programme nucléaire, estiment les analystes américains.

Ces décisions interviennent alors qu’une étude commandée par la Communauté américaine des renseignements (US Intelligence Community – IC) qui regroupe 16 agences américaines de renseignement*, conclut qu’Israël constitue actuellement la pire menace pour les intérêts nationaux américains, sa nature et ses actions entravant des relations normales des Américains avec les pays arabes et musulmans et, à un degré croissant, avec la communauté internationale élargie. Intitulée « Préparation d’un Moyen-Orient de l’après-Israël », cette analyse rapportée par Franklin Lamb* dans Information Clearing House* met en exergue les points suivants : – Etant donné son occupation brutale et son bellicisme actuels, Israël ne peut être préservé davantage que ne l’était l’Afrique du Sud de l’apartheid, lorsque, en 1987 encore, Israël était la seule nation « occidentale » à maintenir des relations diplomatiques avec l’Afrique du Sud et qu’il fut le dernier pays à rallier la campagne internationale de boycott avant l’effondrement du régime.

– Les dirigeants israéliens, qui soutiennent de plus en plus les 700.000 colons illégaux en Cisjordanie occupée, sont de moins en moins en phase avec les réalités politiques, militaires et économiques du Moyen-Orient.

– La coalition du Likoud, qui a succédé au gouvernement travailliste, est sous l’influence du pouvoir politique et financier des colons, avec lequel elle entretient une complicité étroite, et elle sera de plus en plus confrontée à des conflits civils internes auxquels le gouvernement américain ne devrait pas s’associer ou dans lesquels il ne devrait pas s’impliquer.

– À un degré important, le printemps arabe et l’éveil islamique ont libéré une large majorité du 1,2 milliard d’Arabes dans la dénonciation de ce que la quasi-totalité d’entre eux considèrent comme l’occupation européenne illégale, immorale et indéfendable de la Palestine et de sa population autochtone;

– Tandis que grandit la puissance arabe et musulmane dans la région – mise en lumière par le « printemps arabe » – qu’on assiste à un « réveil islamique » et que l’influence iranienne se développe, au contraire la puissance et l’influence des Etats-Unis d’Amérique décroît dans le même temps (quoique l’origine du phénomène soit antérieure), et l’appui US inconditionnel à un Israël belliqueux et oppressif devient de plus en plus indéfendable et impossible à mettre en oeuvre, compte tenu des intérêts nationaux fondamentaux des Etats-Unis, dont la normalisation de leurs relations avec les 57 pays islamiques fait partie.

– L’ingérence grossière d’Israël dans les affaires internes des États-Unis par le biais de l’espionnage et des transferts illégaux d’armes américaines. Ceci inclut le soutien apporté à plus de 60 « organisations de front » et approximativement 7.500 hauts fonctionnaires américains qui font les quatre volontés d’Israël et cherchent à dominer et à intimider les médias et les institutions du gouvernement américain, ce qui ne devrait plus être toléré.

– Le gouvernement américain n’a plus les moyens financiers, ni le soutien public, pour continuer à financer Israël. Les 3.000 milliards de dollars et plus d’aide directe et indirecte apportée par les contribuables américains à Israël depuis 1967 sont devenus hors de prix et sont de plus en plus critiqués par les contribuables américains, qui sont hostiles à la poursuite de l’engagement militaire américain au Moyen-Orient.

L’opinion publique américaine ne soutient plus le financement et la mise sur pied pour le compte d’Israël de guerres américaines perçues comme illégales. Ce point de vue est de plus en plus partagé par l’Europe, l’Asie et le public international.

– L’infrastructure ségrégationniste de l’occupation israélienne mise en évidence par une discrimination légalisée et par des systèmes judiciaires de plus en plus séparés et inégaux ne doit plus être financée, directement ou indirectement par les contribuables américains ou ignorée par le gouvernement américain ; – Israël est un échec en tant qu’ État démocratique et la poursuite de la couverture financière et politique par les États-Unis ne changera rien à son évolution renforcée en État voyou international ; – De plus en plus, le racisme effréné et violent dont font preuve les colons juifs en Cisjordanie est toléré par le gouvernement israélien à un degré tel que l’on peut dire que le gouvernement israélien est devenu son protecteur et son complice ; – Le fossé croissant parmi les Juifs américains faisant objection au sionisme et aux pratiques israéliennes, y compris les homicides et les violences perpétrés sous l’occupation israélienne, sont de grossières violations des lois américaines et internationales et soulèvent des questions au sein même de la communauté juive américaine à propos de la responsabilité américaine dans la protection de civils innocents sous occupation ; – L’opposition internationale au régime d’apartheid croissant ne peut plus être en synchronisation avec les valeurs humanitaires affirmées par les États-Unis ni avec ce que les États-Unis attendent de leurs relations bilatérales avec les 193 États membres des Nations unies.

Le Projet se termine par des considérations sur la nécessité d’éviter de nouer des alliances réprouvées par une grande partie du monde et qui condamnent les citoyens américains à en subir les conséquences.

Il met également en évidence la nécessité pour les États-Unis d’œuvrer à « l’amélioration des relations avec les pays arabes et musulmans, y compris la suppression draconienne du recours à des drones ».

* Franklin Lamb, ancien conseiller assistant à la Commission judiciaire de la Chambre américaine des représentants et professeur de droit international au Northwestern College of Law (Faculté de droit du nord-ouest), dans l’Oregon, a obtenu son diplôme de droit à l’Université de Boston et sa maîtrise universitaire en droit, sa maîtrise et son doctorat en philosophie à la London School of Economics (École d’économie de Londres). Après avoir passé trois ans à la Cour internationale de justice de La Haye, Lamb a été collaborateur invité au Centre d’études juridiques de l’Asie de l’Est à la Harvard Law School (Faculté de droit de Harvard).

* La Communauté américaine des renseignements (US Intelligence Community – IC) qui regroupe 16 agences américaines de renseignement, dispose d’un budget annuel de 70 milliards de dollars. Au sein de l’IC, on trouve les départements de la Marine, de l’Armée, des Forces aériennes, de la Défense côtière, de la DIA (Defense Intelligence Agency – Agence de renseignement de la défense –), les départements de l’Énergie, de la Sécurité intérieure, des Affaires étrangères, du Trésor, de la DEA (Agence Drug Enforcement Administration – Agence de lutte contre le trafic et le la consommation de drogue), du FBI (Federal Bureau of Investigation – Bureau fédéral d’investigation), de la NSA (National Security Agency – Agence nationale de la sécurité), de la National Geospatial Intelligence Agency (Agence nationale des renseignements géospatiaux), de la National Reconnaissance Agency (Agence nationale de reconnaissance) et c’est la CIA (Central Intelligence Agency – Agence centrale de renseignement) qui a commandité l’étude.

Chahid Bendriss

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