Quelle dette devrions-nous marocains au régime nationaliste irakien depuis la Révolution du 14 juillet 1958 et jusqu’à la date de sa chute le 9 avril 2003 provoquée par l’invasion américaine?
Par Sami SHERIF
En 1958, juste après la révolution irakienne, Feu Mohamed V était parti en tournée au Moyen-Orient arabe. Parmi les pays qu’il avait visités, il y avait l’Irak que gouvernait Abdelkerim Kacem porté au pouvoir par les baassistes. Notre regretté Souverain en était revenu avec une escadrilles d’avions de chasse et des bombardier de type Mig offertes par le Zaim irakien à notre armée de l’air qui venait juste d’être créée, mais qui était dépourvue de moyens opérationnels. Dans les faits, ce n’était nullement pour ça qu’il avait décidé cette visite. En effet, sa visite en Irak avait pour objectif quelque chose de très noble, celle d’abord de remercier l’Irak pour les services rendus au Maroc lors de la lutte pour l’indépendance et par la suite de libérer l’ancien Ministre irakien des affaires Etrangères d’avant la Révolution (Abderrahman El Jalabi) qui croupissait ds les geôles, attendant d’être exécuté. Celui-ci n’avait ménagé au temps où il était encore en service, aucun effort pour soutenir aux Nations-Unies la délégation des nationalistes marocains qu’il hébergeait parfois à ses frais à New-York. Le Zaim irakien ne pouvait refuser à feu Mohamed V une telle requête, il avait ordonné sur le champs la libération de l’intéressé auquel . notre ancien souverain avait adressé une invitation à s’installer au Maroc.
Le revirement du Zaim irakien au profit des communistes irakiens juste après la visite de feu Mohamed V à Baghdad et le renversement du gouvernement
nationaliste de feu Abdellah Ibrahim début 1960 avaient été les causes d’un gèle presque complet, mais non déclaré, des relations d’amitié entre le souverain marocain et le Zaim Kacem. En 1964, le leader irakien avait avoué qu’il comptait envahir le Koweït considéré comme une partie du territoire irakien soustrait par les britanniques à l’Irak à la veille de son indépendance en 1928 pour créer cette principauté pétrolière, qu’ils avaient érigée en Etat indépendant en 1960. Les relations entre les deux pays s’en étaient encore une fois de plus trouvées affectées, puisque le Maroc tenait à l’indépendance de cette principauté qu’il venait de reconnaître. Elles ne s’étaient améliorées qu’avec le coup d’Etat ayant reversé Kacem et porté le Générale Abdessalem 3arif au pouvoir fin 1964. La mort de celui-ci dans un « accident d’hélicoptère » en 1966 et son remplacement par son frère Abderrahman 3arif, lui-même générale de l’armée, n’avaient en rien affecté les rapports cordiaux entre les deux pays. Le coup d’Etat des baasistes en 1968 et l’avènement du Général Hassan El Bakr allait donner un coup de pouce à ces relations en raison de l’orientation nettement pro-arabe du nouveau régime. Des centres culturels irakiens avaient vu le jour dans quelques villes marocaines et les échanges commerciaux s’étaient nettement développés. Mais le grand élan qu’avaient pris ces relations ne s’était concrétisé que le jour où le nouveau Zaim irakien Saddam Hussein Al Majid arrivé au pouvoir en 1972, s’était prononcé lors d’un sommet arabe juste après la guerre d’octobre 1973 contre Israël, pour des compensations financières à dédier par la Ligue Arabe aux familles des militaires marocains morts lors des affrontements sur le Golan Syrien.
Avec ce leader, les rapports entre le Maroc et l’Irak allaient connaître un développement sans précédent. D’abord en raison de la position de principe adoptée par le nouveau Zaim quant à la marocanité du Sahara et en suite par la disponibilité exprimée par les responsables irakiens à acheter marocain pour tout ce dont l’Irak avait besoin et que l’économie marocaine pouvait fournir. Ainsi, en quelques années, l’Irak est devenu le client n° 1 de notre industrie textile. En 1975, le Zaim irakien avait proposé d’accueillir en Irak le même nombre de marocains ayant participé à la Marche Verte organisé par feu Hassan II pour récupérer notre Sahara, soient 350. 000 de fellahs nécessiteux. Quatre vingt dix-milles agriculteurs marocains avaient ainsi pu s’établir en Irak. L’Etat irakien leur avait fourni les terres à mettre en valeur, ainsi que les moyens pour le faire (logements, tracteurs, pompes d’irrigation, classes d’école pour leurs enfants…). Après la nationalisation de son pétrole en 1978, l’Irak avait pris la décision de fournir au Maroc du pétrole à moitié prix. Il était ainsi devenu notre premier fournisseur d’énergie et notre premier client en textiles. Ce n’est qu’avec la crise déclenchée par le leader irakien en envahissant le Koweït, que ces relations allaient se détériorer.
Deux incidents avaient même gelé tout contacte entre le souverain marocain et le Zaim irakien : la tentative des forces irakiennes de fermer l’ambassade marocaine au Koweït et les déclarations du Conseiller du Président irakien, Saadoune Hammadi à Rabat faisant une analogie entre l’affaire du Sahara marocain et celle de la présence irakienne au Koweït. En dépit de cette détérioration de ses rapports avec le Zaim irakien, le souverain marocain, s’était démarqué des autres chefs d’Etats arabes ayant envoyé des troupes pour soutenir l’Arabie Saoudite en ordonnant au contingent militaire marocain déployé dans ce pays, de se contenter de défendre des installations pétrolières saoudiennes dans une zone se situant loin des théâtres des opérations contre les troupes irakiennes. De même, il n’avait ménagé aucun effort pour éviter à l’Irak de subir une attaque militaire occidentale qu’il ne pourrait supporter. Nombre d’observateurs pensent à présent, que s’il était resté en vie jusqu’en 2003, feu Hassan II aurait pu éviter à ce pays frère d’être l’objet de l’agression meurtrière qu’il a subie de la part de l’Occident en 2003.
Aujourd’hui, l’Irak est gouverné par un régime tribal et confessionnel très proche de l’Iran. Les occidentaux l’ont préparé à l’implosion. Déjà le nord du pays tenu par les kurdes envisage de déclarer son indépendance. A l’Est du pays, les sunnites se sentent lésé et marginalisés. La légitimité du pouvoir en place est vigoureusement contestée. Une révolution vient de se déclencher, elle est menée par d’anciens officiers de l’armée dissoute par Breimer et par nombre d’anciens responsables du parti Baath dont l’ancien vice-président irakien, 3izat Ibrahim. Mais une grande manœuvre des média occidentaux essaie d’attribuer les succès de cette révolution nationaliste à l’organisation terroriste « Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL). Cette machination vient d’être dévoilée aujourd’hui même. La preuve en est la décision prise ce soir par Obama d’intervenir directement contre les rebelles irakiens. La règle c’est qu’on n’intervient pas contre une organisation que l’on a créée en toutes pièces et que l’on appuie activement en Syrie. Veut-on encore nous jouer une machination semblable à celle des soi-disant armes de destruction massive et des prétendus liens entre feu Saddam et Al Qaida ? Cette fois-ci NO PASSARANT!
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