Par Sami SHERIF
Le gouvernement irakien conduit par des chiites pro-iraniens, vient de céder aux pressions des manifestants sunnites qui depuis près de 21 jours n’ont pas cessé de défier les autorités par leur slogans et leurs doléances dans toutes les villes de l’Ouest du pays. Il vient de libérer des centaines de prisonniers (335) dont nombre de femmes arrêtés à la faveur des évènements qu’avait connu ce pays après l’invasion occidentale de 2003. Il a en plus présenté ses excuses pour leur détention injustifiée, en réponse à une ferme demande des manifestants sunnites mobilisés depuis plusieurs semaines contre le Premier ministre chiite.
Le vice-Premier ministre, Hussein Chahristani, a déclaré lors d’une conférence de presse annonçant la libération des prisonniers : »Je présente mes excuses au nom de l’Etat irakien à quiconque a été arrêté et détenu tout ce temps. Il est apparu plus tard que vous étiez innocents ». « Cela n’est pas seulement arrivé en Irak, c’est arrivé dans plusieurs pays. Je demande à toutes les forces de sécurité irakiennes de ne pas arrêter (des gens, ndlr) dans la précipitation, mais de plutôt se concentrer sur les vrais criminels qui ont commis des crimes contre les Irakiens », a-t-il ajouté.
Mehdi Saleh, 42 ans, a qualifié à sa sortie de prison, le geste du gouvernement de « pas dans la bonne direction ». Il a raconté avoir été transféré de prison en prison depuis son arrestation en 2009 à Fallouja, une ville à majorité sunnite à l’ouest de Bagdad, sans n’avoir jamais été inculpé. « Nous étions vraiment impatients de recouvrer la liberté », a ajouté M. Saleh.
Le mouvement de contestation a démarré après l’arrestation le 20 décembre de neuf gardes du ministre des Finances Rifaa al-Issawi, un sunnite. M. Issawi est membre du bloc laïc Iraqiya, une formation soutenue par la communauté sunnite qui fait partie du gouvernement mais qui est très critique envers le Premier ministre Nouri al-Maliki. Celui-ci a alterné les menaces et les concessions pour essayer de mettre fin à ce mouvement de contestation, qui se traduit notamment par le blocage de l’autoroute reliant Bagdad à la Syrie et à la Jordanie, dans la province d’Anbar. Plusieurs milliers de personnes ont manifesté depuis lors en Irak contre le manque de services publics, la corruption, le chômage ou encore l’incompétence des dirigeants. La manifestation la plus importante, qui a rassemblé deux mille personnes dans le centre de la capitale, s’est terminée dans le calme vers 15 heures. Aucun débordement de violences n’a été signalé lors de la dizaine d’autres rassemblements qui ont eu lieu dans le pays.
La crise qui secoue l’Irak ces derniers temps, intervient à trois mois d’importantes élections provinciales, qui constitueront un test pour M. Maliki et ses opposants, avant des élections nationales l’année prochaine.
Sami Shérif