Palestine occupée : des juges français veulent aller exhumer le corps d’Arafat dans le but de s’enquérir sur les causes exactes de son décès suspect

Trois juges d’instruction français ont officiellement demandé à se rendre à Ramallah, dans les territoires palestiniens, pour procéder à l’exhumation du corps de Yasser Arafat, dont la mort en 2004 en France fait l’objet d’une enquête judiciaire pour « assassinat », a-t-on appris mercredi de source judiciaire.

Cette procédure a été ouverte en août à Nanterre (Hauts-de-Seine) sur plainte de la veuve de Yasser Arafat, après des informations laissant penser que le dirigeant palestinien pourrait avoir été empoisonné avec une substance radioactive.

Souha Arafat a salué la démarche des juges, qui veulent se rendre sur place avec des policiers spécialisés et réaliser des prélèvements. Un feu vert de l’Autorité palestinienne, voire d’Israël, est nécessaire pour ce déplacement. « Je me félicite que les trois magistrats (…) aient d’ores et déjà indiqué officiellement à mon avocat avoir entrepris les démarches nécessaires à leur transport à Ramallah. Ainsi, des experts de la police scientifique française pourront très prochainement effectuer des prélèvements sous leur autorité », écrit-elle dans un communiqué transmis à Reuters à Paris.

« Dès lors, je demande respectueusement à l’Autorité palestinienne et à la Ligue arabe de suspendre toute initiative tant que la justice française est saisie, sauf à agir de concert avec elle », ajoute-t-elle. Elle insiste pour que les juges aient la priorité. « Dès lors qu’une information judiciaire a été ouverte en France, elle doit primer sur toute autre procédure, car elle est la garantie incontestable d’indépendance et de neutralité, en vue de la manifestation de la vérité », écrit-elle. L’Autorité palestinienne a déjà fait savoir qu’elle était d’accord pour faire exhumer le corps, sans déterminer de date ou de procédure. Yasser Arafat avait été transféré en octobre 2004 à l’hôpital militaire de Percy, où il est mort le 11 novembre 2004 à l’âge de 75 ans.

UN EMPOISONNEMENT AU POLONIUM ? La cause exacte de son décès n’a jamais été rendue publique et, selon les éléments de son dossier médical français publié dans la presse, elle n’a pas été médicalement établie.

Selon des examens menés par un laboratoire suisse et dévoilés début juillet dans un documentaire de la chaîne de télévision qatarie Al Djazira, des traces anormalement élevées de polonium, une substance radioactive mortelle, ont été retrouvées sur les effets personnels de Yasser Arafat.

Le polonium 210 est devenu célèbre après avoir été retrouvé dans le corps de l’ex-espion russe Alexandre Litvinenko, mort en 2006 à Londres. La piste d’un empoisonnement a été avancée. Souha Arafat a déploré au début de l’été que les prélèvements biologiques effectués en France sur son mari aient été détruits, ce qui est selon elle étrange.

« On m’a dit qu’on ne savait pas de quoi est mort Arafat. C’est surprenant qu’un pays souverain comme la France ignore la cause du décès d’un chef d’État, soigné dans un de ses hôpitaux », a-t-elle dit dans cet entretien au Figaro.

Président de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) à partir de 1969, Yasser Arafat avait signé un accord de paix avec les Israéliens en 1993 à Camp David établissant une autonomie de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. A sa mort, le conflit avait repris avec le début en 2000 de la deuxième Intifada palestinienne, la construction à partir de 2002 du mur séparant le territoire israélien des territoires autonomes. Israël demandait le départ d’Arafat à partir de 2003, le bloquant militairement dans son QG de Ramallah. Souha Arafat a formulé initialement des accusations contre Israël et les Etats-Unis, qu’elle n’a pas répétées ensuite. « Arafat voulait le succès de la cause palestinienne pour (la création d’un Etat palestinien et c’est pour cette raison qu’ils se sont débarrassés de lui », avait-elle dit à Al Djazira. Israël a nié toute implication dans le décès du leader historique palestinien dès 2004.

Chahid Bendriss

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