Par Chahid BENDRISS
Multipliant les menaces de frappes sur Téhéran, le premier Ministre Benjamin Netanyahu utilise clairement la fenêtre de tir des présidentielles américaines pour peser dans le débat politique américain, avec pour seul objectif de faire tomber un Barack Obama trop peu belliciste à son goût. C’est que sur un plan stratégique, rien ne justifie des attaques sur l’Iran.
Officiellement, « toutes les options sont sur la table ».
Si de nombreux dirigeants israéliens, parmi lesquels le président Shimon Peres, mais aussi le chef d’état major des armées et la communauté du renseigement Israël-Iran : le candidat Obama en ligne de mire sont opposés à une attaque sur l’Iran, le premier ministre Benyamin Netanyahu est plus que jamais décidé à déterrer la hache de guerre.
Dans une annonce macabre destinée à préparer les esprits et qui se voulait rassurante, l’armée de l’état Hébreu a ainsi assuré que le nombre de morts ne dépasserait pas 300.
Une évaluation rapidement revue à la hausse : « 500 victimes » a rectifié le Ministre de la Défense Ehud Barak, pas vraiment sûr de la précision de son coup : « Il pourrait y avoir moins ou plus de morts, mais c’est le scénario auquel nous nous préparons. Les estimations font état d’une guerre qui durerait 30 jours et aurait plusieurs fronts ».
Après la guerre « zéro mort » -dans son camp- inventée par les américains qui s’était révélée peu convaincante, les israéliens lancent les estimations à la louche…
Journaliste spécialisé en questions de défense en Israël, Alon Ben David affirme que « faute d’avoir pu obtenir une suspension du programme nucléaire iranien, le temps de l’action est venu et Netanyahu est déterminé à attaquer l’Iran avant les élections américaines ».
Autre élément renforçant le climat de tensions, cette fois-ci sur la scène politique, la Knesset (Parlement) a entériné, jeudi, la nomination d’Avi Dichter -considéré comme un « dur »- , à la tête de la Défense passive, un ministère crucial en cas de guerre. Ancien chef des renseignements de l’état Hébreu, Uri Saguy estime pour sa part que les menaces de frappe relèvent d’une « hystérie orchestrée dont le timing a été planifié pour placer le pays dans un état d’anxiété, artificiel ou non. Ce serait une erreur d’utiliser la force aujourd’hui afin de contrecarrer le potentiel nucléaire iranien».
De son côté, le secrétaire américain à la Défense Leon Panetta a déclaré qu’il ne pensait pas qu’Israël ait pris une décision définitive concernant une éventuelle attaque de l’Iran qui a promis de riposter en dévoilant récemment une partie de son nouvel arsenal militaire.
Une attaque qui pourrait s’avérer contre-productive Du même auteur
Selon Netanyahu, le président Barack Obama n’aurait d’autre choix que de soutenir la décision israélienne, au risque de se confronter aux lobbys juifs et de perdre une partie des suffrages de la communauté.
« La multiplication récente de déclarations publiques sur l’Iran a pour but, en plus de préparer l’opinion publique aux conséquences d’une éventuelle frappe, de pousser l’administration américaine à davantage de clarté sur le sujet. Les déclarations de la Maison Blanche sont jugées trop vagues par les dirigeants israéliens. En évoquant publiquement l’éventualité d’une opération militaire israélienne imminente, ils veulent pousser les Américains à abattre leurs cartes » expliquait à l’AFP Denis Charbit, professeur de sciences politiques à l’Université de Tel-Aviv.
Plusieurs thinks-tanks américains, pourtant peu réputés pour leur « pacifisme », estiment d’ailleurs qu’une attaque israélienne encouragerait plutôt l’Iran à poursuivre, sinon accélérer son programme nucléaire.
Une dramaturgie aux ambitions purement électorales. … Un coup de billard politique à trois bandes, alors ? Derrière ces menaces de moins en moins voilées à l’égard de l’adversaire iranien, c’est bien son meilleur ennemi Barack Obama, engagé dans une compétition électorale trop délicate pour lancer un débat public sur l’opportunité de frapper Téhéran, que Benyamin Netanyahu chercherait à atteindre.
C’est que dans leurs campagnes respectives, Obama et Romney se disputent les faveurs de l’Etat hébreu. Selon le journal israélien Haaretz, Barack Obama aurait dévoilé en juillet au premier ministre israélien des plans d’attaques américaines contre l’Iran. En revanche, on ne sait rien sur la date et les détails d’une telle éventualité.
Mitt Romney, son adversaire républicain a rapidement surenchéri affirmant qu’il fallait maintenir l’option militaire sur la table pour contrer la «folie nucléaire» de l’Iran. Son entourage a même assuré que le gouverneur «respecterait» une éventuelle décision israélienne d’attaquer l’Iran, sans avoir obtenu le feu vert préalable et explicite des États-Unis.