Par Chahid BENDRISS
Le ministre des Affaires étrangères français, Laurent Fabius, a évoqué le risque de ce qu’il a appelé un « sahelistan », c’est-à-dire d’une zone où règnerait des groupes extrémistes comme Aqmi ou Mujao.
A vrai dire, cela serait pire que l’Afghanistan en raison de la proximité de ce territoire avec le Maghreb et les pays européens. Ce qui est clair aujourd’hui est l’extrême faiblesse du gouvernement malien qui ne peut contrôler son immense territoire, notamment au nord où il y a une situation de non-droit qui laisse le champ libre à la rébellion touarègue du MNLA, d’une part, et à l’agitation de groupes terroristes, Aqmi et autres plus ou moins affiliés, d’autre part.
La revendication touarègue n’est pas de même nature que l’activisme radical. Elle peut et doit trouver une solution politique. En revanche, le danger le plus grave est celui des milices du type Aqmi. On sait que le rêve de groupes terroristes et, aussi, il faut le souligner, de leurs partenaires narcotrafiquants est d’avoir un territoire qui puisse leur servir de sanctuaire. Face à ce péril, tout le problème est la faiblesse de l’Etat malien et de ses forces armées. Cela devrait obliger les principaux pays de la région à prendre la mesure du problème et à aider le Mali.
Or, jusqu’à présent le régime algérien a prétendu s’autoproclamer le gendarme du Sahel et être le chef de file d’une structure régionale de lutte contre le terrorisme qui était surtout un moyen d’exercer une influence et de se valoriser auprès des Etats-Unis et des pays européens, qui sont par ailleurs sévères sur la situation politique et économique de l’Algérie. L’échec d’une gestion sécuritaire algérienne est patent. Il s’explique par le fait qu’Alger s’est ingénié à écarter l’autre grand de la région, le Maroc, de toutes les structures régionales de coopération en matière de sécurité et de défense. Or, rien ne peut se faire sans le Maroc qui est naturellement un pays du champ, puisqu’il a des centaines de kilomètres de frontières avec la Mauritanie.
Depuis des décennies, Alger nourrit des ambitions hégémoniques dans la région. Ces ambitions, qui sont en contradiction avec une action positive qui consisterait à favoriser la coopération régionale, notamment l’intégration maghrébine, ont conduit, dans les années 1970, le régime algérien à créer de toutes pièces l’affaire du Sahara marocain, avec l’aide du bloc communiste, afin de s’octroyer un accès vers l’Atlantique et affaiblir le Maroc. Depuis, tout le Maghreb et le Sahel – et l’Afrique tout entière – sont empoisonnés par ce dossier qui n’est qu’un reliquat de la Guerre froide.
Il est remarquable que la position actuelle de l’Algérie est assez incompréhensible puisque, d’une part, elle prétend défendre l’intégrité du Mali et être hostile à l’instauration d’un Etat de l’Azawad, sachant qu’il y a une forte minorité touarègue en Algérie, et, d’autre part, elle travaille à la création d’un Etat fictif au Sahara marocain, c’est-à-dire qu’elle porte atteinte à l’intégrité du Maroc. De plus, on peut se demander comment l’Algérie concilie ses déclarations visant à préserver la stabilité au Sahel et au Sahara alors qu’elle soutient le mouvement Polisario qui est l’un des facteurs de déstabilisation et d’insécurité dans la région. Le moins que l’on puisse dire est que la politique algérienne a du mal à trouver une cohérence. En tout cas, le jeu algérien est dangereux et d’autant plus vain que le Maroc est une puissance saharienne, sahélienne et africaine de premier ordre que personne ne peut ignorer.