Ce vendredi 22 juin 2012, cinq jours après la fin des opérations de vote en Egypte, des centaines de milliers de manifestants ont campés à la place Tahrir, au Caire, et dans toutes les grandes places des autres villes égyptiennes. L’objectif est de protester contre le CSFA pour le presser de revenir sur sa décision de s’arroger un certain nombre de compétences et d’annoncer immédiatement le résultat officiel de l’élection présidentielle. Le paysage et l’ambiance sur cette célèbre place, rappellent les premiers jours de la révolution en janvier 2011. De fait, les tentes ont refait leur apparition sur la place centrale du Caire, épicentre de la révolution. On y sert du thé, on y vend des tee-shirts « I Love Tahrir » et une foule majoritairement composée d’hommes, acheminés de la province par autocar, sont agenouillés pour prier.
Réunis à l’appel des Frères musulmans, la foule agitait des drapeaux égyptiens et chantait des slogans pour dénoncer le report de l’annonce des résultats. Elle exige aussi l’abrogation de « la déclaration constitutionnelle complémentaire » promulguée dimanche, en plein dépouillement du vote, par le Conseil Suprême des Forces Armées (CSFA), qui dirige le processus de transition depuis le renversement d’Hosni Moubarak en février 2011. Ce texte donne provisoirement aux généraux le pouvoir législatif et dépouille le futur chef de l’Etat de quasiment toute prérogative.
Le communiqué lu sur les chaines de radio et de télévision ce vendredi, annonce que le CSFA a exclu de revenir sur ce texte et prétend que sa décision, est « requise par le besoin d’administrer les affaires de l’Etat durant cette période critique dans l’histoire de notre nation ». Il a aussi fermement critiqué les deux candidats pour leurs cris de victoire. « Anticiper l’annonce des résultats de l’élection présidentielle avant leur proclamation officielle est l’une des principales causes de la division et de la confusion qui prévalent dans l’espace politique. »
C’est seulement samedi ou dimanche que le résultat officiel sera rendu public, mais d’ici là, le climat politique augure d’une tension certaine. « C’est une contre-révolution classique qui ne sera bloquée que par la force des manifestants », déclare Safouat Ismail, un membre des Frères musulmans originaire du delta du Nil. « Je resterai jusqu’au départ des militaires. »
De l’autre côté de la capitale, dans un hôtel luxueux, l’ancien général Ahmed Chafik, qui fut le dernier chef de gouvernement d’Hosni Moubarak, s’est dit « certain » jeudi de « sa victoire » à la présidentielle. « Ces manifestations sur les places, les campagnes d’intimidation et la manipulation médiatique, tout cela vise à contraindre la commission électorale à annoncer un certain résultat », a-t-il dit à ses partisans en liesse. « Je suis totalement convaincu que je serai le vainqueur légitime », a-t-il ajouté, devant les caméras de télévision.
Mr. El Bradaî quant à lui, a estimé qu’il faudrait d’urgence former une commission de médiation entre les partis politiques et le CSFA pour éviter à l’Egypte de sombrer dans la violence, car pour lui « la situation est explosive ».